Article publié dans "Témoignage Chrétien" jeudi 26 juin 2014; avec l'aimable collaboration de Philippe Clanché.
En souvenir d'un grand-oncle déporté il y a 70 ans, et en pensant à l'ambiance de haine actuelle, André Weill (Association Compostelle Cordoue) entreprend ce 28 juin 2014, une marche d'indignation au départ de Drancy (région parisienne). Le suivi de cette marche est publié sur le site d'information Place Gre'net dans la rubrique blog
Marcher n’est pas un mot en l’air, mais un verbe sur terre. Marcher pour ouvrir l’espace. Pour libérer les mots. Et ranger les couteaux. Marcher pour quitter le divan et applaudir la terre des deux pieds. Marcher pour dire ce qui ne peut se dire. Et doit même se taire. Marcher, pour prophétiser les valeurs de la lenteur, de la pauvreté, de l’humilité et du dénuement. Marcher pour exprimer la verticalité de l’être. Pour l’établir entre Terre et Ciel. Pour le proclamer debout, quelque en soit la posture : enfance, dépendance, exclusions, exils, soumissions, infamies, privations de libertés. Même dans les fauteuils de la dépendance, de la maladie, de la vieillesse. Marcher pour dénoncer le crime et le meurtre, fût-il politiquement correct, nationalement correct ou, pire encore, religieusement correct. Marcher pour garder les yeux intelligents sur la beauté et la cruauté du monde.
Fernand Weill. Chacun de nous avons reçu une part de nomadisme spirituel. Ma part à moi s’appelle Fernand Weill, frère de mon grand-père David. Fernand est né le 8 mars 1895 à Paris, ville qu'il a quitté le 20 juin 1940 alors que les armées du Reich pénétraient dans la capitale. Il trouva alors refuge à Lyon auprès de sa belle-famille, dans le quartier de la Croix Rousse. Il fut arrêté par la police française le 20 mai 1944 à Pont-de-Beauvoisin (Isère), pour seule raison de judaïté. Il a rejoint la prison Montluc à Lyon, puis le camp d'internement et de transit à Drancy. Le 26 mai, il envoyait un dernier courrier à sa femme, Eva, et à ses deux enfants, Georges et Mado. Sur une petite feuille de couleur rose, il expliquait que tout allait bien. Il souhaitait un bon anniversaire à sa fille Mado qui venait d'avoir seize ans. Il a quitté Drancy le 30 juin par le convoi 76, destination l’usine d’extermination d’Auschwitz le 5 juillet.
Une marche d’indignation. Dans le contexte actuel du commerce de l’antisémitisme, de l’homophobie et de la xénophobie, j’entreprendrai ce samedi 28 juin 2014 une marche d’indignation. Au départ de Drancy (vers 11h45 Devant le monument aux déportés, avenue J. Jaurès, elle passera par Paris (1), Vézelay, Taizé, Cluny. Les 1er et 2 août, les deux dernières étapes seront Izieu et Pont-de-Beauvoisin, ville de l'arrestation de Fernand. Le trajet emprunte les chemins de pèlerinagede Compostelle et d’Assise.
Chacun est invité à partager cette Indignation. Soit sous forme de témoignages, soit sous forme d’une accolade et/ou de quelques kilomètres ensemble, soit encore sous forme d’un don qui continue la transmission de l’histoire de la Shoah (2) en formant des maîtres et en invitant des écoles. Toute ma gratitude à Élisabeth Pigeon qui m’accompagne dans cette marche et à l’Association Compostelle Cordoue (3) qui soutient cet engagement. « Pace e Bene » à chacun de vous, frères et sœurs nomades de corps d’âme et d’esprit.
André Weill (4)
(1) Lecture devant le Mémorial de la Shoah (rue Geoffroy L’Asnier vers 15 h45, puis vers 18h, Cercle de silence (place des 44 enfants d’Izieu).
Renseignements sur l'ensemble de la marche : 06 63 48 62 70,
(2) Chèque à l'ordre de la Fondation Mémorial de la Shoah, 17 rue Geoffroy l'Asnier, 75004 Paris, Mentionner « Fernand Weill ».
(3) http://www.compostelle-cordoue.org/. Voir le supplément mensuel de TC du 28 mars 2013.
(4) Aux Ed. « Le Mercure Dauphinois » http://www.lemercuredauphinois.fr/