La création de l'association Compostelle-Cordoue.

En 2008, Gabrielle Nanchen, pèlerine de Compostelle, indignée par la figure de saint Jacques Matamore publie De la Reconquista à la réconciliation. En 2009, elle réunit des amis pèlerins pour passer de l'indignation à un projet. Le choix se porte sur l'organisation d'un colloque à Cordoue, avec le partenariat d'AISA sur le thème Un chemin vers la compréhension et le dialogue.

Passer du Matamoros à l'Amamoros

Ce colloque est précédé de marches symboliques de Compostelle et Mérida à Cordoue, sur les pas des chevaliers de la Reconquista, nous voulions aller à la rencontre et non pas conquérir. Voila l'origine du nom de l'association Compostelle-Cordoue. Dans son intervention au colloque, le père jésuite, Paolo Dall'Oglio, fondateur de la communauté de Mar Moussa en Syrie à invité les participants à passer du Matamoros à l'Amamoros. C'est dans cet esprit que l'association poursuit son activité depuis 2012.

Fêter notre dixième anniversaire en août 2019 au Monastère d’En Calcat,  donna l'occasion au président de faire un rappel historique.

Les fondateurs (Louis Mollaret, Gabrielle Nanchen, André Weil) de notre association voulaient orienter différemment le regard porté communément sur les Arabes. Proposer une autre approche que celle de la légende de St Jacques Matamore qui, en la cathédrale de Compostelle, juché sur son cheval, piétine les Maures. Et marcher à l’envers des pèlerins de St Jacques, en partant de Compostelle pour aller vers Cordoue, afin d’y célébrer le «vivre ensemble» de l’Al-Andalus, où cosmopolitisme et tolérance régnèrent pendant plus de quatre siècles. Tel fut en automne 2010 notre acte fondateur.

Notre devise Marcher-Dialogue-Comprendre dit bien l’élan vers l’autre qui nous anime. Depuis dix ans, nous avons traversé à pied neuf pays et régions qui ont connu des conflits ou au contraire des réconciliations: Espagne, Maroc (avec les soufis d’Aïssa), Assise, Liban, Suisse (Nicolas de Flüe), Bosnie (Srebrenica), Palestine et Jérusalem, Bourgogne (Taizé), Côte d’Armor (pèlerinage des Sept dormants).

Vivre dans ses jambes, avec son cœur et son esprit, la rencontre de l’autre qui pense et croit différemment de soi, voilà l’extraordinaire richesse vécue au cours de nos marches et de nos rencontres avec différentes communautés croyantes ou laïques. Notre participation régulière à différents colloques (dont Château Mercier à Sierre) nous a éclairé sur les vrais enjeux du vivre ensemble: dépasser les préjugés que renforcent immanquablement les conflits de toutes sortes, éviter le repli sur des identités religieuses ou culturelles exclusives.

Nos groupes régionaux ont aussi organisé des marches avec différents partenaires, à Toulouse (« Osons la rencontres »), à Paris et en Suisse.

Cet anniversaire, nous avons voulu le fêter en nous rapprochant des jeunes. Ainsi avons-nous marché avec une vingtaine de scouts musulmans et chrétiens de Toulouse et de Paris. Notre colonne de cinquante marcheurs s’est étirée le long de magnifiques sentiers du pays occitan. L’explosive joie de vivre de ces jeunes et leur sens du service nous ont contaminés et rendu notre propre jeunesse. Les rencontres que nous avons faites avec les représentants de communautés musulmane et juive à Montauban, protestante à Puylaurens, bouddhiste à Marsens, et bénédictine à En Calcat, nous ont redonné la confiance qu’apporte la diversité des échanges, des croyances et des rites.

Alain Simonin